NON SOUTENU
AMENDEMENT N°CE442
présenté par
M. Dombreval
----------
ARTICLE ADDITIONNEL
APRÈS L'ARTICLE 13, insérer l'article suivant:
Après le premier alinéa de l’article L. 214‑3 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Tout animal abattu dans un établissement d’abattage doit être rendu inconscient préalablement à la saignée, cette perte de conscience doit être maintenue jusqu’à la mort de l’animal. »
EXPOSÉ SOMMAIRE
Cet amendement vise à ériger l’étourdissement préalable, même réversible, en obligation absolue. L’étourdissement, même, si pas forcément réversible d’ailleurs, est aujourd’hui en théorie, obligatoire et appliqué pour ce qui est de l’abattage conventionnel, mais, dans les faits, il très mal observé puisque on dénombre ; de source officielle, environ 17 % d’échec d’étourdissement, conduisant donc à une mise à mort qui donne donc lieu à des souffrances évitables.
L’objectif de cette disposition serait donc, d’une part de renforcer l’application et l’observance de cette obligation à l’abattage conventionnel et, d’autre part, à le généraliser, tout en acceptant son caractère réversible, supprimant donc la dérogation accordée jusqu’ici à l’abattage rituel.
Concrètement, lors de l’abattage rituel sans étourdissement préalable, les animaux subissent des souffrances supplémentaires à trois moments clefs : avant la saignée, au moment de la saignée et après la saignée. En effet, le délai d’attente des animaux pour être menés jusqu’au piège et mis en contention est allongé, donc source de stress supplémentaire, compte tenu des cris et des odeurs liées à la peur des autres animaux.
Ensuite, la jugulation de l’animal pratiquée sans étourdissement provoque, ainsi que le démontrent les études scientifiques, un stimulus douloureux extrême dû à une section à vif des tissus cutanés, musculaires et vasculaires du cou, de la trachée et de l’œsophage sur un animal conscient. Or, il a été scientifiquement démontré qu’il n’est pas nécessaire que l’animal soit conscient au moment de la saignée pour obtenir une exsanguination complète de la carcasse et donc une viande propre à la consommation humaine.
Même réalisé dans le respect de toutes les préconisations qui l’encadrent, l’abattage sans étourdissement est également source de douleurs supplémentaires et évitables au court de la période suivant la jugulation. La perte de conscience ne sera effective que lorsque la perte de sang aura été suffisante. Pendant toute cette période, l’animal ressent la douleur liée à la plaie de jugulation, à laquelle s’ajoute celle induite par l’éventuelle inhalation de sang ou de contenu digestif. En outre, de faux anévrismes qui provoquent l’obturation des vaisseaux peuvent entraver la saignée et ralentir la perte de conscience, donnant lieu à des manœuvres dites « correctives », qui sont, elles aussi, sources de douleur supplémentaire.
De plus, les cadences imposées au personnel des abattoirs ne permettent pas toujours un contrôle de la perte de conscience effective de l’animal avant de le libérer du box de contention. L’inobservance de ce contrôle risque d’amener à suspendre des animaux encore conscients, leur causant traumatismes et souffrances inacceptables.
Mais bien au-delà de la pratique elle-même, l’abattage sans étourdissement suscite de vives polémiques parce qu’il serait à l’origine de nombreuses dérives pour des motifs purement économiques. Ainsi, en dépit des mesures prises pour prévenir tout détournement des règles en vigueur (autorisation préalable de mise en œuvre de la dérogation, obligation d’enregistrement des commandes ou des ventes nécessitant un abattage dérogatoire, formation et habilitation des sacrificateurs…), il s’avère que le nombre d’animaux abattus sans étourdissement est largement supérieur aux besoins des consommateurs de viandes consacrées et que ce surplus est réintroduit dans la filière conventionnelle. On estime à plus de 20 % le nombre d’animaux abattus selon des rites cultuels.
Enfin, la dérogation à l’obligation d’étourdissement préalable à l’abattage, qui vise uniquement à répondre aux besoins des consommateurs juifs et musulmans français, est également utilisé pour l’exportation, essentiellement vers les pays de confession musulmane du Maghreb, du Moyen-Orient et d’Asie. Selon les différentes sources, 50 à 80 % du volume des viandes abattues rituellement seraient destinées au marché d’export.
Aujourd’hui, les risques à maintenir un dispositif réglementaire en l’état actuel sont importants, ne serait-ce qu’un niveau économique.
En effet, ébranlé par de sévères crises sanitaires, confronté aux récents scandales qui ont conduit à la fermeture d’abattoirs, le secteur de l’élevage ainsi que toute la filière viande sont victimes d’une défiance de plus ne plus forte des consommateurs. Désormais, le respect du bien-être des animaux, tant au niveau de l’élevage que de l’abattage, est un critère intervenant dans le choix de consommation, au même titre que la qualité et la traçabilité des produits. C’est pourquoi, il convient d’agir rapidement pour empêcher l’apparition d’un amalgame entre consommation de viande et cruauté envers les animaux, voire d’un amalgame entre élevage d’animaux et maltraitance. L’avenir de l’élevage français et de la filière viande, en dépend.
L’étourdissement réversible préalable pourrait éviter cet amalgame et permettre le maintien et le développement du marché d’exportation de la viande vers les pays de confession hébraïque et musulmane.
Concernant l’abattage rituel, nombreux sont nos voisins européens qui ont étendu l’obligation d’étourdissement de l’animal. La Suède, la Norvège, l’Islande, le Lichtenstein, la Lettonie et la province d’Aland (Finlande) prescrivent l’étourdissement préalable de l’animal. Aux Pays-Bas, l’étourdissement de l’animal dans le cadre des abattages rituels est obligatoire depuis le 1er janvier 2017. L’Espagne limite la dérogation à l’étourdissement préalable aux seuls abattages rituels d’ovins. L’Allemagne et certaines provinces autrichiennes accordent cette même dérogation pour les abattages rituels dans la limite d’un certain quota.
Ailleurs dans le monde, la Nouvelle Zélande interdit l’abattage rituel et l’Australie prohibe tout abattage sans étourdissement préalable.
L’exportation de viandes vers les pays musulmans, vient majoritairement d’Asie, et plus particulièrement de Malaisie. Dans ce pays de tradition musulmane, une certification Halal, dite norme « jakim » a été édictée. Elle avalise le recours à l’étourdissement de l’animal par électronarcose ainsi que l’usage du pistolet mécanique non perforant. Reconnue au Moyen-Orient et en Asie, cette norme a permis à la Malaisie de conquérir ces marchés à l’exportation.
Nous proposons donc d’imposer, dans tout abattage, un étourdissement préalable réversible ou non. Cette disposition entraîne de fait l’abrogation de l’alinéa 2 ainsi que des alinéas 6 à 11 de l’article R. 214‑70 du code rural et de la pêche maritime.
Commentez directement sur sa page Facebook