Question écrite n° 04118 de M. Sebastien Pla sénateur (Aude - SER) :
M. Sebastien Pla rappelle à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire que depuis septembre 2007, et le règlement de la Commission européenne instituant des mesures de reconstitution du stock d'anguilles, l'État français a mis en œuvre un plan de gestion sur cette espèce avec des déclinaisons par façade, via la mise en place de licences avec des critères de sélection impliquant l'arrêt des pêches pour nombreux professionnels, la limitation du nombre d'engins à déployer ou encore la limitation des périodes de fermeture selon les stades de l'espèce (argentée ou jaune).
Il lui précise que les professionnels d'Occitanie, associés à ce plan de gestion, ont dès lors relâché plus de 67 tonnes d'anguilles argentées de 2015-2018 puis 71,5 tonnes de 2018-2020. Malgré les efforts réalisés (licences/autorisations de pêche ; plans de sortie de flotte ; limitation du nombre d'engins ; dates de fermeture ; relâchers), le plan de gestion européen et le projet de plan de gestion de la commission générale des pêches pour la Méditerranée (CGPM) leur ont imposé une fermeture des pêches durant 3 mois consécutifs pour chacun des stades (jaune et argentée) du 1er décembre au 28 février de l'année suivante.
Il lui indique que ces contraintes pèsent lourdement sur les économies locales car il constate que sur les 60 000 hectares de lagunes que compte le bassin méditerranéen, le nombre de professionnels recensés travaillant l'anguille est passé de 1 pour 99 hectares à 1 pour 232 hectares depuis 2009, tandis que les quantités d'anguilles prélevées à l'hectare ont évolué de 16 kg / ha avant 2009 à environ 5,5 kg / ha aujourd'hui.
En outre, sur les marchés, les professionnels accusent une baisse moyenne du prix de l'anguille de l'ordre de 25 à 30 %, et sont exposés à l'ouverture des marchés à l'anguille nord-américaine, mais aussi à l'augmentation significative de la production en élevage.
Il pointe de plus que le gel des capacités (motrices et jauges) limitées à celles des autorisations 2019 (date à partir de laquelle le segment des anguilles de Méditerranée a été considéré en « déséquilibre »), n'est pas pertinent pour agir sur l'effort de pêche, en Méditerranée française, car les professionnels ne travaillent qu'à l'aide d'engins dits dormants (verveux, capéchades, palangres, nasses, etc.).
Il l'alerte donc sur le fait que, le 8 novembre 2022 les pays tiers de la CGPM ont entériné une recommandation de la Commission européenne qui impose dès 2023, 6 mois de fermeture par stade, en attendant le plan de gestion mis en œuvre à partir de 2024.
Les pêcheurs d'anguille de Méditerranée, soutenus par le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins d'Occitanie, s'en étonnent car ils attendent, à l'inverse, de l'Union européenne qu'elle actionne ses capacités de régulation du marché, de façon à éviter l'écueil d'obliger les professionnels à pêcher plus pour absorber cette concurrence extra européenne et cette tendance baissière des marchés.
En outre, ceux-ci considèrent que la fermeture de 6 mois consécutifs lors des périodes de migration, telle que suggérée dans une proposition de règlement, qui sera examinée lors du conseil des ministres les 12 et 13 décembre 2022, conduirait à la fermeture indirecte de la pêche des anguilles argentées.
Il lui demande donc quelles sont les actions qu'il compte engager rapidement pour préserver la filière des pêches à l'anguille en Méditerranée et éviter la fermeture de 6 mois consécutifs annoncée car ces acteurs, respectueux du milieu et de cette espèce, qu'ils connaissent comme nul autre, ont déjà fourni de nombreux efforts et atteint les objectifs, mais ils ne sont plus en capacité de pouvoir subir de nouvelles mesures sans mettre en péril leurs entreprises et la filière qui en découle.