Question orale de de M. Didier Le Gac député (Renaissance - Finistère) :
Monsieur le secrétaire d'État chargé de la mer, j'associe à ma question de nombreux collègues de tout le littoral français. La pêche est en crise. Ce n'est pas la première fois, certes, mais cette fois, la crise, liée à la hausse du carburant et à l'inflation, menace toute la filière.
En Bretagne, région qui, vous le savez, représente la moitié de la pêche débarquée en France, tout le monde est mobilisé. Vous avez d'ailleurs reçu un courrier des acteurs économiques et politiques vous faisant part de leur très grande inquiétude. Un marin-pêcheur de ma circonscription m'indiquait encore ce matin : « Si les bateaux s'arrêtent, cette fois, c'est toute la filière qui risque de s'arrêter ».
Je sais que vous êtes mobilisé et vous avez annoncé des mesures.
Tout d'abord, un plan de verdissement du carburant maritime avec une ristourne de 13 centimes d'euro par litre de gazole. Ensuite, une nouvelle répartition de la taxe sur les éoliennes en mer en faveur de la pêche. Ces annonces sont bienvenues. Cependant, il faut reconnaître qu'elles ne prendront effet qu'à moyen ou long terme. Or l'enjeu est bien celui de la survie de la pêche française, l'une des plus respectueuses des normes environnementales et sociales, l'une des plus contrôlées aussi. L'enjeu est également celui de la souveraineté alimentaire – je rappelle que nous importons les deux tiers des produits de la mer que nous consommons. Oui, notre flotte doit se moderniser et notre filière mieux s'organiser, mais dans l'immédiat, nous demandons que la France pèse de tout son poids auprès de l'Union européenne afin de prolonger le dispositif d'aide au gazole dit Ukraine après le 15 octobre et de relever les plafonds de l'aide ; ces mesures sont indispensables à l'investissement. Pouvez-vous nous présenter de manière détaillée les actions que mène et mènera le Gouvernement pour soutenir la pêche ?
Question de M. Sébastien Jumel député(Gauche démocrate et républicaine - NUPES - Seine-Maritime) :
La saison de la coquille Saint-Jacques vient d'ouvrir. Le prix du carburant dans le secteur de la pêche tutoie le seuil de 1 euro le litre, alors qu'il était de 60 centimes il y a un an. Dans moins de quinze jours, le 15 octobre, l'État mettra fin à la ristourne de 20 centimes par litre instaurée pour accompagner le secteur, après la flambée des prix de l'énergie liée à la guerre en Ukraine.
La guerre n'est pas finie, le prix du combustible ne faiblit pas et l'aide va s'arrêter. Cette décision est lourde pour la filière, qui a essuyé plusieurs tempêtes ayant brutalisé les trésoreries – le covid et le Brexit, pour ne citer qu'elles.
Pour que les Français comprennent bien ce qui se passe dans le secteur de la pêche, je le dis sans détour : certains armements jouent leur vie avec la suppression de 20 centimes d'aide. Le prix du poisson n'évolue pas, alors que le gazole représente plus de 35 % des charges de l'armement ; cela plombe la rentabilité des marées et la fiche de paye des marins-pêcheurs.
Face à la forte inquiétude de la profession, vous avez annoncé quelques mesures de substitution à l'aide au carburant, mais elles ne nous ont pas convaincus et n'ont pas convaincu les quais. Soit ces dispositions existent déjà – les 7 % de biocarburant dans le gazole –, soit elles ne sont applicables qu'à moyen et long termes. La taxe sur l'éolien, c'est du vent et ça ne fait pas la maille dans l'immédiat. Compte tenu de l'impact économique du prix de l'énergie sur la pêche, la question urgente et vitale consiste à savoir si vous allez accompagner concrètement les armements de pêche après le 15 octobre.
Il y a quelques jours, j'étais chez vous, monsieur le secrétaire d'État, à Saint-Quay-Portrieux, mais aussi à Dieppe et au Tréport. Les marins-pêcheurs attendent que vous preniez des mesures qui sont déjà sur la table ; je pense notamment à la proposition d'une taxe flottante, qui amortirait les vagues de hausse, en attendant la décarbonation.
Question de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback députée (Horizons et apparentés - Seine-Maritime) :
Monsieur le secrétaire d'État chargé de la mer, je viens d'un territoire qui a subi une crise profonde due à l'arrêt de la grand-pêche dans les années 1980. Chaque Fécampois qui l'a vécue s'en souvient comme si c'était hier. Il a fallu à la ville des décennies pour se remettre de cette décision canadienne d'instaurer des quotas. Mes chers collègues, en Normandie comme en Bretagne, la pêche est une boussole : elle fixe le cap.
À la fin de la semaine dernière, j'ai rencontré les pêcheurs de mon territoire. J'ai également lu les déclarations du président du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), qui exprimait toute la colère de la profession face à « [l']accumulation des normes, des menaces, des contentieux » qui « remettent en cause le fondement même [du] métier en culpabilisant [les pêcheurs] ». C'est terrible que d'entendre cela ! Si ces professionnels ont choisi ce métier difficile, c'est notamment pour nous nourrir. Ils ont besoin que nous leur redonnions espoir, que nous leur accordions notre confiance.
Comment encourager des jeunes à choisir ce métier ou à reprendre une entreprise quand des réglementations européennes totalement inadaptées mettent le feu aux poudres, quand une décision du Conseil d’État est incomprise, quand le sentiment se diffuse que les contrôles sont toujours exercés sur les mêmes et ne s’appliquent pas de la même manière sur ceux qui pratiquent les techniques de pêches industrielles ?
Monsieur le secrétaire d'État, je sais que vous vous battez au quotidien aux côtés des pêcheurs. Pourriez-vous présenter à la représentation nationale ce que vous entreprenez pour les défendre ? Cela permettra, je l'espère, de redonner espoir à une profession et à des territoires entiers.
Question écrite de M. BURGOA Laurent Sénateur (Gard - Les RépublicainsN):
M. Laurent Burgoa attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, sur la situation de la filière pêche maritime en Occitanie.
La filière fait face à un faisceau de difficultés qui va au-delà de la hausse du coût de l'énergie, comme la hausse du prix des intrants (filets, pièces mécaniques, glace...), la mise en oeuvre du plan de gestion européen West Med (plan de sortie de flotte, réduction de l'effort de pêche...), l'absence de maitrise du prix du poisson (malgré les nombreux labels obtenus ou développés par la coopérative SATHOAN).
Lors des assises de la pêche le 22 septembre 2023 à Nice, il a été confirmé la fin des aides au carburant au 15 octobre 2023, sans pour autant donner une vision claire de l'accompagnement de la filière. Ces déclarations manquent de clarté quant aux mesures concrètes qui seront prises rapidement pour accompagner la filière vers la décarbonation.
La pêche en Méditerranée ne se résume pas à une simple activité économique. C'est une tradition ancrée dans l'identité de nos communes littorales. Préserver cette filière, c'est maintenir vivante une part de notre patrimoine culturel. Surtout en cette période où la souveraineté alimentaire est mise à rude épreuve, soutenir la pêche locale s'inscrit dans une démarche de résilience et de sécurité alimentaire. Le poisson, aliment sain par excellence, est une alternative pertinente face à la consommation de nourritures transformées ou importées. Miser sur notre pêche locale, c'est faire le choix d'une alimentation de proximité, durable et respectueuse de notre héritage et de notre environnement.
Il lui demande d'accompagner rapidement la filière pêche d'Occitanie pour préserver des emplois mais aussi une économie structurante pour le littoral.
Question de M. BOUAD Denis sénateur(Gard - SER) :
M. Denis Bouad interroge M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer concernant la situation des pêcheurs en Méditerranée. Alors qu'ils n'ont aucune maitrise du prix de vente du poisson, ces derniers doivent faire face à la hausse du prix des intrants ainsi qu'à la mise en oeuvre du plan de gestion européen West Med qui implique notamment une réduction de l'effort de pêche.
Dans ce contexte, le Gouvernement a d'abord confirmé la fin des aides au carburant au 15 octobre 2023 avant d'annoncer une prolongation de ce dispositif jusqu'au 4 décembre 2023. Des discussions sont actuellement en cours avec l'Union européenne afin de pouvoir prolonger les aides carburant au cours de l'année 2024. Le maintien de cette aide semble en effet indispensable afin de préserver l'équilibre économique de nombreuses entreprises de pêche. S'il se réjouit de cette première avancée, il lui rappelle que ces annonces ne permettront pas aux acteurs économiques de la pêche en Méditerranée de se projeter sereinement dans l'avenir.
Au-delà de l'activité économique qu'elle génère, la pêche en Méditerranée représente une part non négligeable de notre patrimoine culturel et participe également à la préservation de notre souveraineté alimentaire. Compte tenu de ces apports essentiels, il lui demande quelles mesures structurantes il envisage de prendre afin d'accompagner la filière, y compris face au défi de la décarbonation.
Question de M. PAUL Philippe sénateur (Finistère - Les RépublicainsR) :
M. Philippe Paul attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer sur la profonde inquiétude des professionnels de la pêche à la suite de sa récente annonce de la fin de l'aide de l'État au gazole à compter du 15 octobre. Dans la conjoncture actuelle de hausse des charges, de coût du carburant en augmentation constante et de prix du poisson stable ou à la baisse, et en l'absence de dispositif de soutien aucun marin-pêcheur ne sera en mesure de partir en mer, sous peine de travailler à perte. Cette situation se traduira par une réduction des apports en criée et mettra en péril l'ensemble de la filière et les emplois qui en dépendent. Il importe que le gouvernement prenne la mesure de ces difficultés qui affectent tout un secteur économique et des territoires déjà touchés par le plan d'accompagnement individuel. Il en va de l'avenir de la filière pêche et à travers elle de la souveraineté alimentaire de notre pays.
Il lui demande donc les initiatives qu'il entend prendre aux niveaux national et communautaire, en étroite concertation avec les représentants de la filière, de nature à l'accompagner à court terme et à lui donner de la visibilité sur la durée. Il le sollicite en particulier pour une intervention auprès de la commission européenne en faveur d'une augmentation du plafond global d'aide par entreprise de pêche bloqué actuellement à 330 000 euros.
Question écrite de M. Thibaut François député (Rassemblement National - Nord):
M. Thibaut François interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'investissement réalisé dans la filière halieutique. Depuis déjà plusieurs mois, certains représentants du secteur de la pêche artisanale font remonter les problématiques liées à la hausse du coût des carburants pour les navires de pêche, notamment à cause de leur taxation. Face à ce problème, le Gouvernement a décidé de prolonger jusqu'au 30 juin 2024, en accord avec l'Union européenne, l'aide de 20 centimes par litre de carburant, ce qui n'est malheureusement qu'une mesure de court terme et qui ne permet pas d'assurer un avenir économique prospère à cette filière, déjà en danger. Est notamment pointé du doigt le manque d'alternatives écologiques dû au manque de capacités financières de la filière pour se décarboner. En effet, il est vain de continuer de taxer le carburant dans l'espoir que les exploitants de la filière se tournent vers des alternatives plus écologiques, si aucune alternative réaliste et crédible n'existe. On peut rappeler qu'il n'existe aucune technologie susceptible de remplacer complètement la propulsion thermique des bateaux. Il souhaiterait par conséquent savoir quelles mesures seront prises afin d'aider ce secteur à se décarboner, sans mettre en danger la filière de la pêche artisanale.
Question orale sans débat de M. Philippe Fait député (Renaissance - Pas-de-Calais):
M. Philippe Fait alerte M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité, sur l'arrêt à venir de l'aide au carburant accordée aux pêcheurs français. Le lundi 20 novembre 2023, M. le secrétaire d'État annonçait au sortir d'une réunion de la commission européenne de la pêche que l'aide au carburant aux pécheurs serait prolongée jusqu'au 30 juin 2024. Par cette action, M. le secrétaire d'État souhaitait soutenir la filière halieutique qui connaît d'importantes difficultés liées notamment aux conséquences du Brexit ainsi qu'au conflit en Ukraine qui a grandement perturbé le cours du prix du pétrole. Fort de l'appel lancé notamment par le Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins des Hauts-de-France et par l'Union française des pêcheurs artisans, M. le député se fait aujourd'hui le porte-voix de toute la filière. La fin de cette aide au carburant à la fin du mois soulève d'ores et déjà de nombreuses inquiétudes. À ce jour, le prix du gazole n'a pas retrouvé son niveau des années passées et ces difficultés se conjuguent à des prix élevés pour les matériels ou bien encore les matières premières comme le fer. Par ailleurs, il est important de noter que le gazole représente une part non négligeable du chiffre d'affaires de ces sociétés (parfois jusqu'à près de 40 %). L'arrêt de cette aide pourrait donc avoir de lourdes conséquences sur l'économie locale de l'ensemble des façades maritimes. Compte tenu des circonstances actuelles, M. le député souhaite faire front avec les communautés de pêcheurs, en particulier celle d'Étaples-sur-mer, qui ne parviennent pas à sortir la tête de l'eau. Comme M. le secrétaire d'État le sait, derrière chaque bateau de pêche, il y a des dizaines de familles qui - plutôt que de vivre - tentent de survivre. Pêcheurs, mareyeurs, fileyeurs, glaceurs ou bien encore caliers ... aujourd'hui, tous lui demandent de prolonger à nouveau cette aide. Cette dernière représente seulement 335 000 euros à ce jour pour le budget de l'État, un montant relativement limité. Mais ce soutien financier est indispensable pour les pêcheurs. La survie de l'ensemble de la filière est en jeu dans les mois et années à venir. La mobilisation de M. le secrétaire d'État sur ce sujet, comme sur d'autres au niveau européen, est donc vitale. Aussi, il souhaite connaître sa position sur le sujet.
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